Dmitry Markov 1

Photographie: Dimtry Markov


MISE EN SCÈNE, CHORÉGRAPHIE & INTERPRÉTATION
Loan Le Dinh

INTERPRÈTES
Valentine Porteneuve, Anouk Orignac, Loan Le Dinh

ACCOMPAGNEMENT ARTISTIQUE
Didier Roux



Tenter de se tenir vivant dans un monde qui s’écroule. Échouer au bonheur. Le vouloir encore. S'accrocher à rien, à tout. Fuir. S'enfuir. Résister malgré tout.

La question qui m'anime depuis quelques années est « comment rester debout dans un univers qui se délite ? ». Cela se traduit tour à tour par l'espoir d'un autre monde, le désespoir de le voir s'effondrer sous nos yeux, l'envie du présent et l’impossibilité d'envisager un futur. Selon les jours, la mort est tour à tour enviée et crainte. Enviée lorsque les sensations d'absurdité et d'injustice deviennent tellement grandes que je pourrais leur préférer la mort. Crainte lorsque le présent se rappelle à moi, immense et plein, dans le regard d'un enfant, dans la mort d'un proche, dans un baiser amoureux, dans une main amie, dans les solidarités de tous les jours.

Je voudrais mettre en lumière les différents « orages contraires » qui nous animent. Je m'intéresse ici à notre part d’humanité, aux solutions que nous trouvons, ensemble ou seuls, aux rituels et petites choses du quotidien auxquelles nous nous raccrochons pour continuer à avancer, pour tenir le cap. Parce qu'il faut bien vivre quand on est vivant.



Le travail


Je pense ce spectacle comme un diptyque. Deux facettes d'une même pièce, deux sujets qui se regardent et se complètent l'un l'autre. Deux façons de ressentir nos existences.

Par ces deux fenêtres, je voudrais ouvrir deux perceptions.
La première, portée par un solo, celle donc d'un
rapport sensible au monde et des discordances auxquelles nous faisons face en tant qu'individu.
La seconde, avec un duo, celle
des relations. Comment faire ensemble, avec l'autre ? Comment faire avec quand on n'est que soi ? Quelle part de commun avons-nous ?

Ce qui guide mes essais, c'est le passage d'une chose à l'autre,
la transformation, qu'elle arrive par la métamorphose ou par la rupture.

Le rythme a une place fondamentale. J'aimerais que ce travail amène à faire ressentir au spectateur ce décalage, cette zone de friction entre le réel tel qu'il est donné et la façon dont chaque personnage le perçoit.

L'écriture chorégraphique mêle des gestes du quotidien, d'autres plus abstraits, de la danse, des déplacements. J'inclue aussi la voix. Elle peut venir en son pur, bruits de gorges, « gromolo » ou alors en mots, pour former quelque chose qui se dit, parole jetée au plateau comme on ponctuerait une pensée. La voix est traitée ici comme un mouvement et fait parti intégrante du travail de corps.


(( Extrait de note chorégraphique ))


mains sur genoux « frap frap frap » – TEMPS
coup de tête - zyeutage DroiteGauche
translation « pffouuuuuu » comme un fantôme
----- douceur, yeux fermés, lente avancée diago, le souvenir du baiser chute sur les genoux –

chercher frénétiquement avec les mains, sur soi, autour de soir, à terre

Il y a aussi l'utilisation du grotesque. Le visage et tout le corps peuvent être déformés, les postures seront caricaturées. Je vois dans le grotesque la possibilité de rendre compte du trop, de pouvoir témoigner des paradoxes qui nous animent jusqu'a leur paroxysme.



« le grotesque apporte moins la catharsis que la confirmation de l'instabilité de tout »


Véronique Klauber



La musicalité des corps m'apparait centrale, c'est cette spécificité qui permet selon moi d'allier tous ces aspects. En ça, les travaux de Maguy Marin et de Pina Bausch sont des références auxquelles je reviens sans cesse.


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